La madame du Conseil Général.

Publié le par Sifoell

Vous savez comment faire pour faire une demande de PCH (prestation de compensation du handicap) ?
Et bien, je vais vous expliquer comment monsieur Charmant, qui je le rappelle, est invalide à 80% et nécessite une aide pour les gestes de la vie quotidienne, l'a fait.
Naïf qu'il était, monsieur Charmant s'est dit que cela serait plus facile, ou plus rapide, ou peut-être aurait plus de poids, en faisant cette demande avec l'aide d'un SAVS, Service d'Aide à la Vie Sociale. Le choix se porta sur le SAVS de l'APF, Association des Paralysés de France, de la ville de Nantes. Charmant les a donc contacté par mail en août 2007, mois de notre emménagement dans notre appartement, ensemble, tous les deux en amoureux.
La rentrée est passée, puis l'hiver a commencé et en décembre, quelle ne fut sa surprise quand Charmant a reçu un coup de fil de l'assistante sociale du SAVS de l'APF, disant qu'elle le rappelait parce qu'elle n'avait plus de ses nouvelles (euh... ça fait juste quatre mois pour répondre à un pauvre mail, mais bon...).
Des rendez-vous réguliers furent donc pris, au rythme de un ou deux rendez-vous par mois, à raison d'une heure et demi environ le rendez-vous, pour remplir ce fameux dossier de demande de prestation de compensation du handicap. En y repensant, ce n'est vraiment pas hyper compliqué à remplir, mais bon, on ne savait pas alors par quoi on allait passer...
Madame Assistante Sociale et Madame Ergothérapeute sont donc venues régulièrement chez nous, je m'arrangeais pour être présente à chaque rendez-vous avec mon employeur.
Il a fallu six mois pour remplir ce fichu dossier qui a été posté par les soins du SAVS en juin 2008. SIX MOIS. Là réside ma rage profonde. Six mois de blablas, de tournage autour du pot, de langue de bois. Tout cela pour faire une demande de PCH Aides humaines (qui comprend autant les aides humaines employées en prestataire, mandataire ou de gré à gré, que l'indemnisation de l'aidant familial).
Bon, le fichu dossier est parti pour le Conseil Général, qui décide. En décembre (2008), coup de fil providentiel du Conseil Général - chargé de payer les prestations de compensation du handicap. Le CG mandate un médecin évaluateur - en l'occurrence, là, c'était une ancienne éducatrice spécialisée qui est venue évaluer les besoins en aides humaines de Charmant, pour au final faire en deux heures trente ce qui a mis six mois à être faits par le SAVS de l'APF.
Je vais vous raconter ce rendez-vous assez dantesque, qui m'a valu un fou rire à me pisser dessus - mais je me suis contentée d'en pleurer, de rire.
La madame du Conseil Général arrive, et s'excuse des vingt minutes de retard, ce qui en soi, n'est pas très grave. Elle se confond en excuses et explications maladroites, ce qui n'est toujours pas très grave, mais juste un peu chiant. Commence alors l'entretien à proprement parler.
La madame du Conseil Général prend ses dossiers, résume rapidement la situation : Charmant, handicapé, chef d'entreprise, moi, aidante familiale et étudiante. Oui, c'est cela. Bon. Elle prend ensuite une jolie feuille toute blanche et dessine dessus un bonhomme sans jambes (la tête, le tronc et les bras, quoi), et dit : "Ca, c'est Monsieur Charmant." Je lance un regard interloqué au Charmant en question. La madame du Conseil Général continue ses explications : "Ensuite, il y a une grande maison, avec plein d'étages et plein de bureaux". Elle dessine sa grande maison et ses plein d'étages et plein de bureaux. "C'est la maison de la MDPH" (Maison Départementale des Personnes Handicapées). La Madame veut juste expliquer que le dossier du petit monsieur sans jambes (et pourtant, il en a, des jambes), va être étudié en commission par la MDPH qui s'occupe de la PCH aides humaines, aides techniques, aides professionnelles et aides animalières (y en a peut-être d'autres, mais j'ai la flemme de vérifier). Mais avant qu'elle ait eu le temps de terminer sa très parlante explication, je jette le regard de trop à Charmant, qui, lui, a de l'éducation et reste impassible, alors que moi je me décompose littéralement, commence à couiner, puis à hoqueter, puis à avoir très chaud et à m'éventer de la main avant d'exploser de rire, de me confondre en excuses et d'aller plier tout mon linge propre dans ma chambre pendant vingt minutes, en pleurant de rire. J'ai donc laissé la Madame du Conseil Général en tête à tête avec un Monsieur Charmant qui devait profondément me détester de lui foutre la honte.
Bref, tout cela pour dire qu'après ce rendez-vous dantesque, la même trame de la semaine a été réalisée en terme de besoin en aide humaine, ou présente responsable, par monsieur Charmant et la Madame du Conseil Général. Et que cette même trame avait déjà été faite par le SAVS. Bref...
Tout cela pour dire que d'après nos premières estimations, cela va être chaud, et tout cela pour dire qu'il est vraiment très difficile pour l'aidante familiale et compagne que je suis, d'une personne handicapée, de devoir assumer les différents rôles qu'offrent ma vie : femme, compagne, aidante familiale, étudiante, amie.
Et j'espère que le dossier de monsieur Charmant ne va pas trop traîner parce que je m'épuise, et que je n'ai plus assez d'énergie pour pouvoir faire ce que je veux faire de ma formation, en terme de recherches notamment. Je n'y suis pas assez investie, parce que je n'arrive pas à tout mener de front.
Mais, tout n'est qu'une question de temps.

Publié dans Dans l'intime

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C
ENORME !!!! :-DJe crois que j'aurais pas pu tenir non plus, c'est trop fort ! :-DEn tous cas bon courage pour la suite... J'ai la chance que ça ait été beaucoup plus rapide pour moi, j'ai dû effectivement faire le dossier en 2/3h, et quelques mois plus tard j'avais mon accord pour le 24/24... Je vous souhaite que ça finisse mieux que ça n'a commencé !
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